Cesr rendez-vous, animé par Cécile Helle, notre vice-présidente chargée de l’aménagement du territoire ont fait halte à Nice le Jeudi 10 novembre 2011 à l’Université de Nice Sophia Antipolis, au Théâtre du Grand Château de Valrose
Le programme était le suivant :
14h15 Ouverture du Rv du SRADDT
Cécile HELLE,
Vice-présidente de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur
Patrick ALLEMAND
1° Vice Président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur
14h15 – 15h30 Les systèmes métropolitains intégrés, leviers de développement territorial – Territoires 2040
Les métropoles constituent une porte d’entrée de la France particulièrement intéressante explorée par MichelLussault dans le cadre de la démarche animée par la DATAR. Michel Lussault, part du postulat qu’il existe desmétropoles, comprises comme des systèmes territoriaux qui fonctionnent dans un rapport spécifique au monde,ainsi qu’un processus de métropolisation, qui détermine leur évolution. La métropole française, aujourd’hui,est à la fois multipolaire, mobilitaire et fragmentée. On constate une tension apparemment paradoxale entreces trois notions.
Comment un espace urbain qui se conçoit et qui se promeut comme un espace de lacirculation généralisée, se constitue-t-il en même temps comme un espace de la séparation et de lafragmentation ? Quelles sont les dynamiques à l’oeuvre sur le territoire métropolisé ? Dans quelle mesure lessystèmes métropolitains intégrés sont-ils aujourd’hui un levier de développement territorial ?
Michel LUSSAULT-
géographe, professeur à l’université de Lyon (Ecole Normale Supérieure de Lyon),
15h45 – 16h 45 Quelles métropoles et quelle gouvernance des métropoles françaises à l’horizon 2040 ?
« La “métropole” n’est-elle qu’un mot ? » En effet, si le vocable s’est répandu dans le discours des acteurs despolitiques territoriales, l’accord sur ce qu’il recouvre précisément est loin d’avoir été atteint. Comme l’indiqueMichel Bassand, les usages fidèles au sens étymologique du terme, se référant à l’idée de ville mère rayonnant culturellement sur des périphéries soumises, n’ont plus guère cours. Par ailleurs, la banalisation du termecontredit l’idée classique selon laquelle la métropole est rarissime, du fait de sa taille mais également despouvoirs qu’elle concentre et qu’elle exerce. C’est bien d’ailleurs un des enjeux qu’aborde ici Gilles Pinson :comment gouverner les grands territoires ? Avec quelles institutions, quels instruments ? Faut-il parler de gouvernement ou de gouvernance métropolitaine ? Pour quels effets socio-spatiaux et politiques ? Autant dequestions envisagées à travers les scenarii construits par la DATAR dans le cadre des travaux de Territoires2040, ici exposés.
Gilles PINSON
– politiste, professeur à l’université de Lyon (Sciences Po Lyon) laboratoire
16h45-17h00 Conclusion Hervé GUERERRA
Conseiller régional délégué au SRADDT
Voici l’intervention que j’ai faite à cette occasion pour mieux introduire l’exemple de la métropole niçoise dans la discussion qui par ailleurs a été fort interessante.
« Mesdames et messieurs, pour illustrer le thème des métropoles et systèmes métropolitains, qui nous réunit ce matin permettez moi de vous livrer certains éléments de notre territoire et de la réforme des collectivités territoriales qui me paraissent essentiels pour notre réflexion.
Comme vous le savez la mise en œuvre de la loi de réforme des collectivités territoriales, promulguée le 16 décembre 2010, est désormais en marche pour ce qui concerne les dispositions relatives à l’intercommunalité.
Dans le cadre de la recomposition intercommunale, plusieurs projets de métropoles et de coopérations métropolitaines sont en cours en région, il en est ainsi du projet de métropole marseillaise et de pôle métropolitain dans l’aire urbaine d’Aix- Marseille ainsi que de la métropole « Nice Côte d’Azur » regroupant la communauté urbaine de Nice Côte d’Azur, des communautés de communes dela Tinée, des Stations du Mercantour et Vésubie Mercantour et la commune dela Tour-sur-Tinée qui vient d’être créée par décret du 17 octobre dernier.
Avec la loi de réforme territoriale, l’objectif poursuivi par le législateur est d’une part, de simplifier le paysage institutionnel par la diminution du nombre d’Etablissements Publics de Coopération Intercommunale et d’autre part, de renforcer les territoires métropolitains français, « portes d’entrée de la mondialisation ».
Il souhaite en faire les pivots d’une armature urbaine en mutation, les lieux essentiels du développement, de l’innovation et de la croissance.
D’après un rapport parlementaire de 2008, la Francesouffrirait d’un « déficit de métropolisation de niveau européen » auquel il conviendrait de remédier comme le souligne également le Conseil Economique et social du 9 avril 2003 : « l’objectif est de faire émerger quelques métropoles dont le rôle est essentiel dans la structuration de l’espace et dans le rayonnement de la France ». La priorité est donnée au renforcement des fonctions métropolitaines des grandes villes françaises, celui-ci étant promu au rang d’enjeu national.
Si l’on s’attache ne serait-ce qu’à décrire la métropolisation sous l’angle de la mondialisation des économies territoriales et définir les métropoles par leur poids économique, politique, social et culturel ainsi que par leur pouvoir d’attraction et de diffusion, on observe que les espaces métropolitains de Provence-Alpes-Côte d’Azur sont très largement atypiques au regard des critères habituels de forte concentration des ressources et des richesses, des emplois tertiaires supérieurs, de densité du poids économique, d’importance démographique et de rayonnement international.
Si la région Provence-Alpes-Côte d’azur est une grande région urbaine dont les villes sont attractives et densément peuplées, en revanche les grandes fonctions économiques et métropolitaines s’organisent largement sur le territoire régional et ne sont pas uniquement concentrées dans les seules villes capitales de département.
Sachant cela, l’objectif de renforcement des fonctions métropolitaines recherché notamment dans le projet de contour de la métropole niçoise pose question tant du point de vue d’une stratégie de développement économique que des objectifs de développement durable.
En effet, si l’on retient parmi les indicateurs de métropolisation économique et sociale, la forte présence d’emplois métropolitains supérieurs, force est de constater qu’une part très importante de cadres des fonctions métropolitaines dans l’emploi total se situe en dehors du périmètre de la métropole : cette part est de 8, 2 % pour Nice Côte d’Azur, alors que elle s’élève à 18,2%, soit près d’un emploi sur cinq pour la communauté d’agglomération de Sophia Antipolis.
Le taux de cadre des fonctions métropolitaines dans l’emploi n’a nulle part ailleurs en province progressé plus vite que sur le territoire de Sophia Antipolis, où il a quasiment triplé entre 1982 et 2007, se situant ainsi au premier rang de l’ensemble des 153 EPCI de province non loin de certains EPCI franciliens. Cela s’explique notamment par la très forte surreprésentation des cadres de la conception recherche (9,1% de l’emploi contre 2,5% en moyenne des EPCI de même taille). Contrairement àla Communautéurbaine Nice Côte d’Azur qui affiche en revanche une faible présence et un développement limité des emplois métropolitains stratégiques avec (moins de 10 %) au regard des EPCI comparables de plus de 200 000 emplois ce qui la classe à l’avant dernier rang de cette catégorie.
Par ailleurs, si la métropole a pour objectifs de répondre aux défis de développement durable, de ce point de vue, la métropolisation ne peut se faire par étalement urbain du littoral dense vers les moyen et haut pays, territoires de montagne.
En effet, comme l’a relevé également l’enquête ménage déplacements des Alpes-Maritimes, plus le territoire est urbain, plus l’usage de la voiture est faible : 2 déplacements motorisés sur 3 dans le moyen pays contre 1 déplacement sur 2 sur le littoral.
Or, le développement d’un système de transport en commun articulé avec le territoire régional constitue un enjeu majeur des déplacements, auquel le périmètre dela Métropolene répond pas à l’évidence.
D’autre part, les enjeux de la coopération intercommunale de l’arrière pays et du littoral relèvent d’une autre logique de solidarité que celle de la métropole. La métropole niçoise s’étend sur70 km(à vol d’oiseau) nord-sud avec une extension essentiellement en milieu montagnard, à cet égard ne risque – elle pas de contribuer à éloigner davantage les citoyens de leurs élus locaux, y compris pour décider de questions qui concernent des services publics de proximité en zone de montagne dont l’accessibilité est souvent rendue difficile ?
Sans aller plus loin, l’exemple de la métropole niçoise, reflète bien toute la difficulté qu’il y a, à appréhender la question métropolitaine et les effets induits de la métropolisation dans des territoires aussi atypiques que ceux de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Aussi, j’écouterais avec intérêt l’apport à notre réflexion des universitaires et participants aux travaux de recherche Territoire 2040, que sont Michel Lussault et Gilles Pinson, pour nous parler de la façon dont ils conçoivent ces espaces urbains et vous invite vous tous à débattre sur les enseignements à en tirer pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ».