Un 21 avril à l’envers. François Hollande face à Marine Le Pen. Ce serait la configuration du second tour de l’élection présidentielle si seuls les agents du secteur public votaient, selon une étude du Cevipof réalisée en décembre 2011 et publiée en janvier sur les intentions de vote des fonctionnaires. Une catégorie qui, précise l’auteur, Luc Rouban, directeur de recherche au CNRS, représentent « 5 millions de personnes, soit environ 12 % de l’électorat », l’étude prenant en compte les entreprises publiques, ainsi que les 3 fonctions publiques (Etat, hospitalière et territoriale). Comme chez les salariés du privé, le « niveau du diplôme et de responsabilité » tient un rôle majeur dans le « degré de politisation ou d’engagement à gauche », qui concerne les cadres et les enseignants. Les employés (catégorie C) et les cadres intermédiaires (B) sont la frange la plus attirée par le « ni-nisme », ni à droite, ni à gauche, ce qui se traduit par de l’abstention ou un vote d’extrême droite. Marine Le Pen a, d’ailleurs, fait des fonctionnaires une cible, développant un discours de défense des services publics.
Les fonctionnaires porteraient donc au second tour Marine Le Pen contre François Hollande avec, en moyenne pour la première,17,5 % des intentions de vote – plutôt en-dessous de son score national -et près de 34 % pour Hollande (plutôt au-dessus de sa moyenne). C’est dans la fonction publique territoriale que le candidat socialiste atteindrait le plus haut niveau (38 %) et dans les entreprises publiques que la candidate du FN réussirait le mieux (24 %). Une configuration qui s’explique notamment, selon l’étude, parce que la fonction publique « constitue en 2012 le point nodal de l’anti-sarkozysme », nourri, notamment, par les suppressions de postes. Le chef de l’Etat n’atteint en moyenne que 13,5 %, quasiment 10 points en deçà des sondages nationaux actuels.
Plus largement, en comparant avec les votes de 2007, on constate un « attrait de la droite modérée [qui] s’est affaissée chez toutes les catégories de fonctionnaires, au profit de la gauche, pour les plus diplômés, et du FN, pour les moins diplômés ». François Bayrou s’effondre à 10 % quand les cadres du public et les enseignants avaient voté pour lui à 21 % et 26 %. Nicolas Sarkozy ne baisse que de 4 points chez les cadres (de 23 % à 19 %) et – surprise -gagne 1 point chez les enseignants, de 15 % à 16 %. Il chute, en revanche, de 6 points chez les employés du public et de 10 points chez les policiers et militaires. Dans l’hypothèse d’un second tour, Hollande contre Sarkozy, l’écart serait sans appel chez les cadres du public, à 58 %, contre 28 % et plus encore chez les enseignants, à 67 % contre 22 %. En revanche, ce duel pousserait à l’abstention 21 % des employés du public et 43 % des policiers et militaires.
On voit bien la sanction qui guette le président de la république chez les fonctionnaires. La RGPP a laissé des traces;