Raymond Aubrac vient de mourir. Il fait partie de ces hauts personnages dont on aimerait croire qu’ils soient éternels. Même à 97 ans, alors que c’est dans l’ordre des choses, on se retrouve surpris, pris au dépourvu ! On comprend que l’on ne verra plus cette silhouette usée, voutée, certes mais qui annonçait cet esprit oh combien vif, cette intelligence fulgurante, cette épaisseur qui n’appartiennent qu’aux grands hommes. On prend conscience aussi du privilège d’avoir connu un tel personnage.
Raymond Aubrac était l’une des dernières personnalités de la Résistance à avoir connu Jean Moulin. Il était le dernier survivant des chefs de la Résistance réunis et arrêtés en juin 1943 à Caluire (Rhône) avec le chef du Conseil national de la Résistance (CNR).
En 1947 et 1950, il avait été témoin à charge lors des deux procès du résistant René Hardy (mort en 1987), accusé d’avoir livré Jean Moulin à la Gestapo et acquitté au bénéfice du doute.
Raymond Aubrac était très actif et avait notamment été ovationné en février 2008 après un discours défendant la laïcité, lors du meeting de campagne de Bertrand Delanoé pour les élections municipales. Il avait été commissaire du gouvernement dans notre région à laquelle il continuait de porter de l’intérêt. En 2004, il était venu à Nice à l’invitation de Michel Vauzelle et de moi-même visiter le musée de la Résistance que la région héberge dans ses locaux de la plaine du Var. Je garde de cette visite un souvenir très ému. Il avait présidé cette année là, le comité de soutien à Michel Vauzelle pour les élections régionales.
Mais il portait toujours un regard attentif à la jeunesse. Malgré son age avancé, il était également venu à Nice à l’invitation du MJS parler des valeurs de la République, du Conseil National de la Résistance. C’était à l’hôtel Splendid.
Récemment encore, je l’avais sollicité pour me venir en aide et demander au maire de Nice de préempter l’appartement situé au-dessus de la galerie Romanin, rue de France c’était l’un des refuges de Jean Moulin. Nous n’avions pu mener ce dossier à bien. Il était surchargé de travail, je l’avais trouvé un peu plus lointain que d’habitude.
En perdant Raymond Aubrac, la France, mais au-delà l’humanité toute entière, perdent un des derniers grands témoins de la Résistance et du Conseil National de la Résistance dont est issu notre modèle social à la française.
Sachons nous souvenir que la défense de ce modèle est aussi l’un des enjeux des scrutins des 22 avril et 6 mai prochains.