D Day : l’impérieux devoir de mémoire

 

« Les sanglots longs des violons de l’automne bercent mon cœur d’une langueur monotone ». C’est ce message de radio Londres au soir du 5 juin qui annonça le débarquement.

Cette opération militaire, baptisée Overlord, fut la plus grande de l’Histoire, tant par ses complications que par l’importance des moyens mis en œuvre. C’est le général Dwight David Eisenhower qui fut chargé de sa mise en place.

Dans la nuit du 5 au 6 juin, l’armada la plus formidable jamais rassemblée s’approche des côtes françaises : 2 727 bateaux de types les plus variés chargent ou remorquent plus de 2 500 engins de débarquement escortés par 590 navires de guerre.

36 parachutistes des Forces Françaises Libres  furent  parachutés en Bretagne vers minuit dans la nuit du 5 au 6 juin. L’un d’eux, le caporal Emile Bouetard, un Breton, fut tué au combat entre minuit et une heure le 6 juin à Plumelec. Il fut probablement le premier mort du débarquement. Les Alliés sont de diverses nationalités : des Britanniques et Canadiens (83 115),des Américains (73 000) mais aussi des Français, Polonais, Belges, Tchécoslovaques, Néerlandais, Norvégiens, etc., soit environ plus de 200 000 combattants en tout.

Des différentes plages où ont débarqué les Alliés, c’est Omaha Beach surnommée « Bloody Omaha » (Omaha la sanglante), qui connut le plus de pertes humaines. Un vétéran interrogé ce matin sur une chaine d’information continue, disait ce matin, « la mer était rouge ».

Aujourd’hui, la Normandie accueille les commémorations du 70e anniversaire du Débarquement. C’est un très grand évènement puisque dix-neuf chefs d’État seront présents, dont la reine Elizabeth II, Barack Obama, Vladimir Poutine, mais aussi le tout récent président ukrainien Petro Porochenko.  Près de 2000 vétérans ont fait le voyage, sans doute pour la dernière fois et se promèneront sur les plages qu’ils foulèrent parmi les 130.000 soldats alliés du «jour le plus long». La plupart sont âgés de plus de 90 ans: avec leur disparition, les prochaines grandes célébrations du D-Day basculeront du souvenir à la mémoire. «Les vétérans sont en train de partir petit à petit. Si l’on veut que le 6 Juin continue à vivre, les jeunes doivent prendre le relais » et devenir, comme l’avait dit Elie Wiesel, à propos de la Shoa, « les témoins des témoins ». Près de 3000 combattants périrent ce jour-là. Ils sont morts pour notre liberté, qu’ils fussent américains, anglais, canadiens, australiens…

Michel Sardou, qui n’est pas ma référence absolue, y fait allusion dans l’une de ses chansons, les Ricains « Un gars venu de  Géorgie Qui se foutait pas mal de toi Est v’nu mourir en Normandie ».

Le rappeler n’est pas être pro-atlantiste. Je pense qu’il ne faut jamais oublier. En ce sens la cérémonie au cimetière US de Colleville a été particulièrement émouvante. «La France n’oubliera jamais la solidarité entre nos deux pays» a déclaré François Hollande dans son discours à la mémoire des combattants tombés il y a 70 ans lors du débarquement le 6 juin 1944. «Nous célébrons aujourd’hui une date mémorable de notre histoire où nos deux peuples se sont confondus dans un même combat, celui de la liberté», «Jamais nous n’oublierons le sacrifice des soldats américains». Pour Barak Obama, «C’est un honneur pour moi de rendre honneur à ces hommes, à ces femmes», «Omaha beach, la Normandie, ce sont les plages de la démocratie». Aujourd’hui un sondage effectué auprès des Français démontre que désormais les français considèrent les allemands comme des alliés plus surs de la France que les américains. C’est la preuve que De Gaulle et Adenauer ont eu raison.

Certains critiqueront sans doute les fastes de cette commémoration. Pas moi. Le D Day est sans doute le jour le plus important pour notre nation, pour notre liberté de tout le 20eme siècle. Et en cette période particulièrement trouble où les idées de l’extrème droite reviennent au cœur du débat politique, il est primordial de rappeler les valeurs, nos valeurs, celle qui continuaient à survivre dans la résistance et qui ont prévalu à l’ouverture de la plus grande période de paix que l’Europe ait connu dans l’histoire contemporaine.

La présence de tous ces chefs d’Etat, représente un succès diplomatique pour François Hollande, en pleine crise ukrainienne, qui s’est permis de faire du président ukrainien, l’invité d’honneur du déjeuner du Château De Benouville, et d’avoir aux cérémonies à la fois Poutine et Obama, alors même que Poutine n’a pas encore reconnu le nouveau président de l’Ukraine. Ce n’était pas évident. C’est le genre de numéro d’équilibriste dans lequel notre président excelle. Obama, faisant sensation en arrivant au déjeuner avec un vétéran, n’est pas mal non plus dans le genre Mais c’est aussi un signal très fort envoyé par tous car le message adressé est puissant, il indique que le message du D day passe au dessus de toutes les considérations politiques actuelles. C’est cela que tous les républicains doivent retenir, notamment en France.