Délibération 1.2 – Communication du rapport d’observations définitives de la Chambre Régionale des Comptes sur la gestion de la commune de Nice à compter de l’exercice 2006
Monsieur le Maire, Mes chers collègues,
Le rapport définitif de la Chambre Régionale des Comptes sur la gestion de la commune de Nice vient à point nommé au moment du débat sur les orientations budgétaires. Avant de vous dire ce que j’en pense je voulais saluer la qualité du travail des services qui ont permis à la commune de répondre aux premières observations.
Lorsque j’ai lu ce rapport, je me suis dit qu’hélas je n’avais pas tort. Tout ce que j’ai dénoncé point par point dans la gestion de cette ville, dans les choix qui ont été fait se retrouve condensé dans un rapport précis, technique et par moments cruel.
Il y a dans ce rapport 3 grands thèmes, la situation financière, le personnel et l’Opéra de Nice, enfin le projet de la Gare du Sud. Bien qu’il soit passionnant de bout en bout j’insisterai tout particulièrement sur la situation financière, parce que je vous dis depuis des années que nous allons dans le mur et que cette fois nous y sommes.
Nous y sommes parce depuis quelques années, je qualifie toujours monsieur Pradal de Gérard Majax de la finance, sauf que les réponses qu’il a fournies à la Chambre des comptes n’ont pas convaincu. Comme tous les magiciens, un jour on finit par découvrir le truc et la magie disparaît.
Et la réalité nous rattrape.
La chambre régionale des comptes qualifie la situation financière de préoccupante. Combien de fois me suis-je fait traiter d’incompétent dans cette salle pour avoir dit par avance ce que nous lisons aujourd’hui.
Nous lisons que l’épargne dégagée par la section de fonctionnement ne permet plus de couvrir le remboursement de l’annuité en capital de la dette, qu’une nouvelle dégradation s’est opérée en 2014 sous l’effet conjoint de la baisse des dotations de l’Etat et de l’intégration de l’annualité de l’Allianz Riviera. Et que la dette qui était de 367 millions en 2007 dépasse les 500 millions fin 2014.
Il y aura donc une insuffisance de l’épargne nette sur la période d’environ 100 millions d’euros qui fait que la section de fonctionnement ne pourra pas contribuer au financement de nouveaux investissements qui ne pourront se réaliser sans recours à l’endettement.
Cela fait des années que j’alerte vainement sur la baisse de la capacité d’autofinancement brute qui était de 55 millions d’euros en 2010, qui s’est effondrée ( le mot est de la Chambre) à 37 millions d’euros en 2014, date de l’entrée en scène de l’Allianz Riviera au point qu’il ne représente plus que 7 % des produits de gestion alors que les juridictions financières considèrent qu’à partir de 15 %, soit le double, c’est insuffisant. La CRC considère (P13) que l’impact financier du stade conduit à une baisse de la capacité d’autofinancement nette de la ville de près de 10 millions d’euros. Ainsi, poursuit la chambre, le financement du nouveau stade est une des raisons majeures du fait que la section de fonctionnement ne puisse plus contribuer aux nouvelles dépenses d’investissement.
Et pire, la CRC indique que cette tendance devrait se poursuivre et même s’amplifier du fait de la baisse des dotations et de la hausse des annuités de la dette.
Et donc, la commune a été obligée d’augmenter les impôts en 2015 ! Ce n’est plus Patrick Allemand qui le dit, ce sont les magistrats ! Et l’expression est d’ailleurs magnifique. Pour qualifier votre entourloupe de l’an passé, (P20), de magicien, Monsieur Pradal s’est transformé en esthéticienne ! La chambre parle d’une baisse cosmétique du taux de la taxe d’habitation de 21,33 à 21,31 %, qui ne compense pas, pour les ménages, la réduction des abattements sur les bases qu’elle a opérés. Donc vous avez augmenté les impôts.
Le rapport rajoute (P25) que dans ces conditions il va y avoir un ralentissement de l’investissement communal à partir de 2014.
Car par ailleurs, le stock de la dette, la dette s’est fortement accrue. Elle est passée de 367 millions d’euros en 2007 à 527 millions d’euros en 2013 ! Et comme l’épargne brute de la commune n’augmente pas, le seuil des 9 ans pour la capacité de désendettement, considéré par les magistrats comme inquiétant est dépassé. Il était évalué par les magistrats de la chambre régionale des comptes, pas par Allemand, à 6,9 années en 2011, 9,5 en 2013 et…13,7 années en 2014 !
Alors le résultat c’est la situation 2015 dont nous n’avons pas encore, et c’est normal, le compte administratif. La Chambre a acté la volonté de la commune de diminuer la dette à l’horizon 2020 et de réaliser 300 millions d’euros d’investissement sur 6 ans. Mais les magistrats livrent une information que, eux mêmes, pas nous les élus, qualifient de majeure. En 2014, la CAF brute (37,1 millions d’euros) n’était pas suffisante pour couvrir l’annuité en capital de la dette (44,6 millions d’euros), c’est à dire que la CAF Nette était négative plus de 7 millions d’euros. Et depuis, cela se dégrade encore.
Or les contraintes vont s’accroître et vous ne pouvez plus utiliser le levier fiscal puisque vous l’avez utilisé l’an passé en relevant le taux de la taxe de séjour et en appliquant la majoration de 20 % pour les résidences secondaires, sans compter la hausse des impôts locaux de plus de 5 %.
Voilà les conclusions auxquelles aboutissent les magistrats : situation très préoccupante. Tellement préoccupante qu’ils indiquent que même en faisant des efforts considérables, et ils en reconnaissent quelques uns, même en stabilisant la masse salariale, les effets ne pallieront que partiellement et que même en baissant encore le niveau des investissements, il faudra à la fois utiliser le fond de roulement et maintenir un niveau de la dette élevé. C’est calamiteux.
Alors, qui va faire les frais de cette mauvaise gestion ? Eh bien le personnel bien sûr, c’est tellement facile. Cinq recommandations de la chambre concernent le personnel. Et je veux saluer votre décision de ne pas donner suite, ni sur les tickets restaurant, ni sur la prime aux vacances et de défendre le principe du paiement des heures supplémentaires à ceux qui, sur le terrain, les effectuent vraiment.
Et puis, il y a l’Opéra, et là je dois dire que c’est pire que je ne l’imaginais. La chambre (P48) pointe l’absence d’un véritable organigramme alors qu’il y a 350 agents pour un budget global de plus de 20 millions d’euros ! Vous avez d’ailleurs anticipé une de leur recommandations puisque nous allons voter tout à l’heure une délibération pour le recrutement d’un directeur général auquel nous souhaitons la bienvenue et en même temps bon courage.
Parce que même si la situation s’est améliorée, elle est confondante vu d’où nous partions ! Sur les 15 plus grands opéras de France nous étions 15ème en 2010 concernant l’activité. Il y a eu en 2010 seulement 87 soirées de programmées, 123 en 2014 tout de même. Une amélioration essentiellement tirée par les concerts. En fréquentations de l’opéra nous sommes 10ème sur 15. Les ballets se sont effondrés, la moyenne des spectateurs également. On est passé de 656 spectateurs en 2008 à 498 en 2014 !
Pas étonnant que dans ces conditions, la CRC trouve (P53) le modèle coûteux et surdimensionné, disproportionné par rapport au service rendu. Notre opéra pompe 9 % des moyens des opéras de province mais ne produit que 4 % de l’activité. La CRC considère l’orchestre surdimensionné (P60) puisque 100 musiciens le mettent au niveau des plus grands orchestres philarmoniques du monde, par la taille. Un musicien participe en moyenne à 50 représentations et travaille en moyenne 55 heures par mois, soit très en deçà des obligations de services prévues par voie conventionnelle soit 1076 heures par an. On en est à la moitié ! la CRC préconise le respect du temps de travail, et de tirer profit de cette augmentation du temps de travail pour développer l’Offre de l’opéra de Nice, tout en préconisant une réduction d’effectifs à hauteur de 70 musiciens. Aucune de ces recommandations ne me choque à priori.
Mais enfin ce rapport démontre bien que la situation n’est pas celle que monsieur Pradal nous décrit annuellement avec son talent. Les masques sont tombés. Cette ville est très mal gérée.