Intervention de Patrick ALLEMAND sur les délibérations sur l’attentat du 14 juillet à Nice.
Il n’y a pas moins de 25 délibérations qui sont en lien direct avec l’attentat du 14 juillet 2016 dont Nice a été la cible.
Je veux tout d’abord acter le fait que vous ayez accepté sur ces délibérations, comme sur d’autres, d’accroître le temps de parole de l’opposition. Je vous en remercie. Le débat démocratique gagnera.
L’opinion publique comprend qu’il y ait aujourd’hui un débat apaisé, constructif, nourri par la majorité et ses oppositions. Il faut lui adresser ce message de respect, de rassemblement en cette circonstance exceptionnelle. Il ne s’agit pas d’une scène de règlement de comptes.
La justice a été saisie, faisons lui confiance, laissons-la travailler dans la sérénité et nous verrons les conséquences qu’il faudra tirer une fois les responsabilités établies. Dans l’attente, les polémiques politiciennes, d’où qu’elles viennent, ne sont pas de mise. Soyons ensemble à la hauteur de ce drame qui nous a tous atteint.
L’examen de ces 25 délibérations montre l’effort financier accompli par la ville de Nice. Cet effort s’est concentré sur deux axes : L’accompagnement et la sécurité.
L’accompagnement des victimes et de leurs familles, notamment l’exonération de certains frais comme la restauration scolaire et l’aspect mémoire d’abord avec les délibérations 0.1, 1.1, 1.2, 3.2, 10.1, 35.1 et 40.1.
L’accompagnement des blessés économiques de l’attentat ensuite. Le soutien aux acteurs économiques (0.2), l’étalement des taxes de séjour pour les hôtels, des redevances pour les plagistes (3.1 et 5.1).
La sécurité ensuite, avec l’audit de sécurité, la sécurisation des espaces publics, la sécurisation des écoles, des bâtiments publics, de partenariat avec l’Université.
J’aurais aimé poser publiquement des questions sur ces dispositifs, pourquoi la société LOTAN par exemple pour le diagnostic ? Même si j’ai reçu du maire une réponse circonstanciée.
J’aurais aimé vous faire des propositions pour améliorer certaines délibérations. Je pense, par exemple, que la délibération concernant la sécurisation des espaces publics doit intégrer la Gare SNCF et la place du Pin, car on ne peut pas ne pas tirer les conséquences de ce qu’il s’est passé à Orlando. J’aurais pu revenir aussi sur la question du périmètre d’indemnisation pour les commerces touchés dans leur activité, au-delà du boulevard Gambetta.
Je n’ai pas le temps, alors j’ai choisi de parler de ce qu’il n’y a pas dans ces délibérations. Je veux parler de la prévention et du vivre ensemble.
Ce qui me heurte, c’est l’indigence de la délibération 4.1 sur la cohésion sociale et la politique de la ville. Nous sortons d’un attentat qui a fait 86 morts. Depuis il y a eu des dizaines d’arrestations dont plusieurs adolescentes en préparation d’attentat.
Ce n’est pas moi, c’est le Procureur de la République qui le dit. Nous sommes l’une des villes les plus gangrénées par la radicalisation, nous avons, paraît-il, plus de fichés S à Nice qu’à Paris intra-muros et, la seule réponse à ce défi géant, qui doit mobiliser tous les républicains, c’est un partenariat avec les Editions Mémoires Millénaires ! J’attendais autre chose.
J’aurais aimé trouver une délibération sur l’égalité hommes-femmes parce qu’il n’est pas possible que l’intégrisme islamiste porte atteinte à la liberté des femmes. La liberté ! Pour moi, la question n’est pas celle du voile ou pas. Mais aucune jeune fille, aucune jeune femme, aucune femme ne doit être voilée sous la contrainte d’un père, d’un frère ou d’un mari. La collectivité doit construire une réponse de protection parce que la république doit protéger celles qui résistent.
J’aurais aimé trouver une délibération sur la santé, des partenariats avec le Conseil départemental et avec la CPAM pour intensifier l’effort sur la prévention des maladies mentales et des phénomènes dépressifs. Parce que le désespoir n’est plus seulement un drame individuel, c’est désormais un danger pour tous. Faire en sorte que les suivis des chocs post traumatiques, liés à l’attentat, soient identiques, que l’on ait de l’argent ou pas, et être attentifs aux plus fragiles qui n’auront pas les moyens financiers si un suivi psychologique long s’avère nécessaire. J’en profite pour saluer l’effort du gouvernement et de Marisol Touraine qui a mobilisé des moyens supplémentaires pour nos hôpitaux qui les réclamaient. 24 postes supplémentaires.
J’aurais aimé trouver une délibération sur la laïcité et les valeurs républicaines à l’école, et notamment sur la gratuité des Temps d’Accueil Educatifs parce que la fréquentation des TAE est inversement proportionnelle au niveau socio-économique des familles. Vous êtes en train de créer une inégalité de plus. Or, nous avons besoin de TAE à haute valeur ajoutée sociale, faisant la promotion de la citoyenneté et des valeurs de la République.
J’aurais aimé enfin, une grande délibération sur la vie associative dans les quartiers, parce qu’elle est une arme de la reconquête, parce que c’est au cœur des associations que l’on brasse le plus de mixité sociale. J’aurais aimé une annonce d’une hausse de 30 % de l’enveloppe consacrée par la ville à ces associations en droit commun et que ce soit les petites associations, les moins subventionnées, qui en bénéficient en priorité pour diversifier les réponses possibles.
Je n’ai rien trouvé de tout cela.
Certes, la réponse de la ville doit être sécuritaire et vous l’avez fait, mais elle ne peut être uniquement sécuritaire.
Néanmoins, nous voterons pour l’ensemble de ces délibérations. En attendant les suivantes.