Ce n’est pas de football dont je parle. Les équipes qui gagnent sont toujours belles et parfois aussi même celles qui perdent, comme ce fut la cas de notre équipe nationale à Séville en 1982.
La France Black-Blanc-Beur de 1998, celle de Zidane est loin. Parce que l’Histoire avec un H majuscule est passée par là. Les attentats du 13 novembre 2015 à Paris, au stade de France, sur les terrasses, et au Bataclan ont fait plus de 120 morts. A Nice, 86 morts en 4mns 17 le 14 juillet 2016 et tant d’autres gestes de folie moins spectaculaires, mais tout aussi traumatisants.
La société française a été au bord de la fracture et la force de la République est d’avoir permis de tout surmonter. Mais le vivre ensemble avait paru tout à coup relégué au rang des slogans et des utopies.
Le message que vient de faire passer l’équipe de France, c’est que le vivre ensemble est possible. Les joueurs ont compris que s’ils gagnaient, ce n’était pas seulement la coupe du monde qu’ils ramenaient. C’était aussi un puissant message.
Moi qui suis un passionné de football, je ne me souviens pas avoir vu des joueurs avoir une expression politique comme cette fois :
Adil Rami : « Je n’ai jamais vu une équipe de France avec une telle ambiance…/… on a un pays qui a souffert. je suis français d’origine marocaine. je suis fier d’être français de la diversité ».
Paul Pogba : » C’est de la folie, je n’y crois pas. On l’a fait. On est là ! Tout le monde a le sourire. On est tous content en France. La France, partout vous allez être fiers de nous. On est entré dans l’histoire. On va faire vibrer la France entière. On est tous unis, jaunes, verts, bleus, on est tous ensemble ! »
Antoine Griezmann : » On a hâte d’aller fêter cela avec les français ! je vis un rêve. Le président Macron est fier. On est fiers d’être français ! »
Plusieurs joueurs se sont exprimés sur la République. Nous sommes peut être à l’aube de quelque chose. Le message était clair. D’où que l’on vienne nous sommes la France ! Une France de toutes les couleurs mais la France, la France qui gagne parce qu’elle est unie.
Il ne s’agit pas pour la classe politique de « faire de la récupération » mais de comprendre ce qui est en train de se passer et de tout faire pour que le pays puisse s’appuyer sur cet acquis pour le faire prospérer et qu’il ne soit pas comme en 1998, un simple feu de paille.
Hier soir nous nous sommes arrêtés à Planet Sushi en rentrant de la place Masséna. Un homme qui m’a probablement reconnu, m’a interpelé en me demandant « si j’étais français ». Je lui répondu que « oui ». « Pourtant vous êtes blanc » me dit-il ! « Vous avez vu cette équipe, il n’ y a que des noirs. « Et alors » .Vous trouvez ça normal, elle vous plait cette équipe »? « Oui c’est une belle équipe et une équipe qui gagne! ». Ce fut ma réponse.
Quand il s’est levé pour partir il a maugréé « pauvre France ». Peu à peu la France du passé s’éloignait de ma table.
Ce qui s’est passé hier soir est un coup dur pour l’extrême droite, c’est bien mieux qu’une défaite électorale, c’est une défaite sur des valeurs et sur une conception d’une nouvelle France qui ne leur correspond absolument pas.