C’est un de mes contacts Facebook qui m’a conduit à rédiger ce court billet. Hier matin, nous étions nombreux, juifs et non juifs à nous retrouver à la gare SNCF de Nice Thiers pour commémorer la rafle du Vel d’Hiv. Je l’ai mentionné dans l’activité du jour et un contact m’a écrit : « mais pourquoi encore la Shoah ? » .
Et j’ai eu envie de répondre.
Répondre pour rétablir certains faits et mon interprétation personnelle. Il faut continuer à commémorer les grands évènements symboles de la Shoah et la rafle du Vel d’Hiv en est un particulièrement douloureux, parce qu’il symbolise la faillite de l’ État français, pas de la France heureusement.
Le 17 juillet 1942, est organisée la plus grande rafle de juifs et le régime de Vichy a mis a disposition 9000 policiers et gendarmes pour parvenir aux 13 000 arrestations effectuées. C’est un des pires moments de la collaboration.
J’ai dit l’État français et pas la France puisque c’est en France que le plus de juifs ont été sauvés, par des anonymes dont certains sont devenus « justes », mais pas tous, loin de là. La communauté juive a perdu 25% de sa population en France. Ce chiffre est effrayant, mais pourtant, c’est le plus bas de tous les pays concernés par la ‘solution finale’ qui, au moment du Vel d’Hiv, portait un nom plus champêtre : ‘vent printanier’.
Nice n’a pas échappé à ce mouvement de solidarité. Ici, c’est Alois Brunner, qui était chargé de ces basses œuvres. Il était arrivé auréolé de ses ‘succès’ en Autriche, notamment, où des milliers de juifs avaient été pourchassés et envoyés dans les camps. Heureusement pour notre communauté, la solidarité de nombreuses familles a joué à Nice mais aussi dans les villages de Clans, Saint Martin Vésubie, Saint Étienne de Tinée, et Saint Léger : de nombreuses vies ont pu, ainsi, être épargnées.
J’ai entendu ce matin Jacques Chirac se faire encenser pour son discours du Vel d’Hiv de juillet 1995. C’est légitime. J’y amène simplement une nuance. Jacques Chirac est né en 1930. C’est à dire qu’il avait, au moment de la rafle, l’âge d’une des petites filles qui portaient ce matin des portraits d’enfants partis de Nice pour être gazés à Auschwitz. François Mitterrand, avec sa part d’ombre, était né en 1916. Il avait déjà, malgré son jeune âge, été un acteur de l’époque. Bien moins important que De Gaulle qui, lui non plus, n’avait pas reconnu la responsabilité de l’Etat français. Et pourtant, qui, plus que lui, eût été légitime à le faire, De Gaulle, sans qui la France ne serait plus tout à fait la France. Simplement, Chirac a pu le faire 64 ans après, parce qu’il n’y avait quasiment plus d’acteurs majeurs de l’époque en vie, ce qui, donc, rendait possible ce geste sans risquer d’ouvrir à nouveau des plaies du passé. Mais il ne faut pas lui en ôter le mérite.
C’est pour toutes ces raisons qu’il faut continuer à commémorer le 17 juillet.